L’ombre de la foudre (#1) d’Alexandra G. Lauryne

  • Titre : L’ombre de la foudre (#1)
  • Autrice: Alexandra G. Lauryne
  • Éditeur : autoédition
  • Catégorie :urban fantasy

Débuter dans le monde du livre, c’est comme se propulser dans l’immensité de l’espace. C’est pourquoi je me suis proposée pour lire et chroniquer le tout premier roman d’Alexandra G. Lauryne. Une nouvelle autrice qui a le courage de se lancer en autoédition. Je la remercie chaleureusement pour sa confiance et espère l’aider à briller tels les constellations et les astres de notre ciel nocturne.

Après une enquête rudement menée sur les agissements véreux de gérants d’hôtels de luxe, Cassandra s’apprête à rentrer à Paris avec sa meilleure amie, Iris, et son amoureux, Fred quand un rêve prémonitoire l’incite à repousser son départ. Une fois dans le vol BA158, celui-ci disparaît des radars au niveau du fameux triangle des Bermudes. Durant ce laps de temps, Cassandra rencontre une déesse grecque emblématique qui l’invitera à accepter son destin et ses pouvoirs.

Ce roman d’urban fantasy prend sa source dans la mythologie grecque et principalement du mythe de la prophétesse Cassandre. L’autrice indique clairement qu’elle le remet à sa sauce pour notre plus grand plaisir. J’avoue avoir été relire le récit de la devineresse, car celui-ci était plutôt flou dans mon esprit. C’est mon petit péché mignon de vérifier les bases utilisées, détournées ou écartées par les auteur.rices. Je trouve cela toujours intéressant de voir comment iels élaborent leur histoire sur des légendes qui possèdent souvent des centaines de versions et dont on ne connaît qu’une poignée.

Je m’égare un peu, revenons à nos moutons olympiens. J’ai adoré sa manière d’intégrer les dieux grecs dans son roman qui exploite la notion du libre arbitre et l’espoir de voir en l’être humain une créature capable de s’extraire de la fange maléfique dans laquelle il s’embourbe. Bref, de faire le bien en prenant soin d’eux et de la Terre en quittant cette attitude autodestructrice qui anime bon nombre d’entre nous.

Ces thématiques sont l’enjeu de la partie d’échecs jouée par deux dieux. Une partie dont seule la première manche vient de finir. Et comme beaucoup de premier tome et de début de match, on ressent cette mise en place des pions : de notre trio et du rôle des passagers de l’avion. On assiste au développement des pouvoirs de l’élue, qui n’apprend pas à les maîtriser, mais qui doit dépasser sa peur la plus tenace, celle qui régit sa vie depuis son enfance.

Cassandra possède le don de prémonition. Elle reçoit ses visions soit en méditant soit en rêvant. Des songes qui s’apparentent souvent à des terreurs nocturnes. Suivant les conseils de sa grand-mère, Hélène, elle a toujours dissimulé son pouvoir par crainte d’être rejetée et étiquetée en tant que sorcière. La seule autre personne qui connaît son secret est Iris. Cassandra ose, néanmoins, se confier à son amant, Fred pour le convaincre de repousser le vol. Elle fera des pas titanesques pour dévoiler ses capacités et en être fière.

Les prémonitions font rarement l’objet d’un pouvoir ultra puissant dans les romans. L’urban fantasy n’est pas au cœur de mes lectures. Pourtant, j’ai l’impression que ce genre recourt bien plus souvent à des dons explosifs (magie élémentaire, par exemple) que passif qui engendre des scènes moins spectaculaires.

L’ombre de la foudre ne déroule pas sous nos yeux des actes époustouflants ou dignes de scénarios hollywoodiens. Si les passagers de l’avion disparu forment une armée, il n’y a pas de bataille emplie de sang et de bâtiments qui s’effondrent. Bon, il y a quand même certains épisodes violents et glauques (notamment de scènes d’intimidation), mais l’ensemble du récit s’apparente plus à un thriller humain que fantastique. Alexandra G. Lauryne a fait le choix de la subtilité en employant la sournoiserie et la manipulation. Une méthode bien plus efficace que des feux d’artifice qui nous éblouit qu’un court instant.

En opposition aux agissements de l’ombre, les exploits de « l’armée » collent parfaitement à la thématique défendue par la romancière. D’où les choix scénaristiques judicieux. Le but est d’inciter les humains à devenir une version meilleure d’eux-mêmes. Cela serait incohérent d’user de la violence. Les passagers prêtent main-forte à Cassandra et repousse le mal en posant des actes de bravoures sans violences. Et c’est là, l’originalité de l’histoire qui nous montre le chemin de l’évolution positive. Malgré les bassesses de l’ennemi, les héros ne s’abaissent pas à leur niveau et le font en gardant leur libre arbitre. L’un des points qui m’ont subjugué concerne les secrets de la déesse. Lorsque l’avion atterrit sur l’île, celle-ci ne divulgue pas l’objectif de la mission de Cassandra. Une manière d’éviter à la jeune femme de se sentir obligée d’endosser son rôle, car un enjeu pareil ne peut que mettre la pression sur les épaules d’une belle âme.

Une belle âme qui n’est pas pour autant une faible princesse. Cassandra défend la justice grâce à ses articles percutants qui dénoncent les malversations. C’est dans ce cadre qu’elle rencontre Fred. Celui-ci souhaite qu’elle dévoile les dessous nauséabonds de son entreprise. S’il se présente comme un protecteur au début du livre, j’ai été ravie de voir qu’il n’endossait pas le rôle de chevalier servant qu’il pensait être. Notre Cassandra peut se défendre seule. Elle n’est pas une princesse en détresse. L’amour entre eux fait partie intégrante de l’histoire. Toutefois, je n’ai pas ressenti l’attachement et ce qui découle des épreuves qu’ils traversent. Mon petit cœur de pierre a encore frappé. Cependant, j’apprécie grandement la fin du premier tome les concernant.

Fred a un côté espiègle. Il recourt à la boutade pour consoler Cassandra. Cependant, ses tentatives sont maladroites, car la légèreté ne convient pas aux sujets importants pour elle, comme toutes les femmes en fait. Je pourrais illustrer cela par cette phrase : un bouquet de fleurs n’effacera jamais nos problèmes ! Fred possède un don pour le mentalisme et l’hypnose. Cependant, on ne voit jamais ses capacités en action. Il n’apprécie pas Iris qu’il trouve étrange. Il se méfie des dieux et a un côté colérique.

Iris est mon personnage préféré grâce à son tempérament marginal. Positive, elle protège Cassandra sans l’étouffer. Elle est là en soutien lorsqu’elle en a besoin. Elle lui prodigue soins et pâtisseries à souhait. Gourmande, Iris croque la vie à pleines dents en profitant du moment présent. Dès le départ, un mystère s’installe autour d’elle, même si on le devine. J’aurais aimé plus d’interactions avec Cassandra. Ses apparitions m’ont paru trop courtes et peu nombreuses, bien qu’adéquates au récit. Tout comme Hélène que j’aurais adoré voir plus présente, car elle m’a conquise dès son intervention à l’écran.

L’antagoniste se révèle détestable et j’aime ça. Je ne lis pas ou ne regarde pas souvent d’histoire sur la mythologie grecque. Pourtant, les exemples qui surgissent dans ma mémoire le présentent tous comme un grand dieu respecté. Je remercie Alexandra G. Lauryne de l’avoir enfin dépeint comme l’horrible personnage qu’il est : un pervers qui se croit tout permis. Même si elle lui prête des idées écologiques bénéfiques pour la planète, cela n’a pas adouci mon regard sur cet être que trop d’hommes ont pris en exemple au cours de notre Histoire. J’aimerais souligner le fait qu’elle n’a pas employé l’habituel antagoniste divin pour construire son récit. Nous verrons bien ce que nous réserve le tome 2, mais éviter de diaboliser Hadès fait du bien.

La plume incarne les émotions fortes comme la colère et l’injustice avec brio. En quelques lignes de dialogue, le portrait des personnages est dressé avec justesse. On sait à qui on a affaire. Cependant, la description ou le résumé des faits se glissent un peu trop dans la narration à mon goût, notamment concernant l’enquête menée par Cassandra aux Bermudes. Toutefois, certains de ces passages sont nécessaires malgré la sensation de longueur, en raison de leur cohérence et de leur poids dans l’histoire. Je pense, par exemple, aux questionnements et à l’investigation faisant suite à la disparition de l’avion. Il aurait été incongru que l’autrice passe cela sous silence ou trop facile qu’un sortilège d’oubli soit jeté à l’ensemble de la population terrienne. Par ailleurs, cet épisode témoigne des recherches pointues de la romancière sur le domaine de l’aviation et de ses procédures. J’avais l’impression de regarder un reportage sur l’un des avions disparus dans le triangle des Bermudes. Cette capacité à se fondre dans l’univers qu’elle exploite se retrouve également dans les apartés des dieux qui empruntent à la prose des grandes pièces du théâtre classique. J’ai ressenti la prestance et la grandiloquence des divinités de l’Olympe. Le seul petit bémol que je retiens concerne l’absence de l’écriture de Cassandra. Journaliste reconnue, elle est dépeinte comme ayant la plume aussi acérée et droite que l’épée de la justice. J’aurai aimé lire le début de l’article dénonciateur des malversations du complexe hôtelier en exemple, car notre héroïne se montre bien douce tout au long du roman. J’aurai adoré voir cette facette matérialisée.

En bref, le premier tome de L’ombre de la foudre emprunte une direction originale qui sied parfaitement à la thématique principale : rendre l’humain meilleur grâce aux actes de bonté qui lui vient du cœur. Prônant la subtilité au spectaculaire, l’autrice nous offre un roman d’urban fantasy sortant des sentiers battus. Malgré quelques longueurs au départ, j’ai eu des difficultés à lâcher cette revisite du mythe de Cassandre par la suite. 

2 commentaires sur “L’ombre de la foudre (#1) d’Alexandra G. Lauryne

Laisser un commentaire