- Titre : Sorcière de chair
- Autrice : Sarah Buschmann
- Éditeur : Noir d’Absinthe
- Catégorie : horreur fantastique
Sorcière de chair est arrivé dans ma wishlist après la lecture de plusieurs chroniques dépeignant le coup de poing violent que ce récit décoche en pleine poitrine. Lors de ma première visite au Salon du Livre de Mons en 2022, je n’avais pu résister à la tentation de me le procurer malgré un budget serré. Je regrette de ne pas l’avoir sorti avant l’annonce de la fermeture de la maison d’édition Noir D’absinthe. J’espère que ce roman ne tombera pas dans l’ombre, enterré sous le désert aride du monde livresque.
Australie, 2016.
Sept ans après un massacre qui a décimé toute une famille, de nouveaux meurtres surviennent à Melbourne. Des homicides si sordides que la Sorcellerie de Chair, taboue depuis les grandes chasses qui ont déchiré le pays, est évoquée.
Pour Arabella Malvo, lieutenante de la brigade criminelle, ils s’avèrent particulièrement déstabilisants. Pourquoi les victimes lui ressemblent-elles comme des sœurs ? Le meurtrier la connaît-elle ? Pourquoi maintenant ?
Une chose est sûre : l’abîme qu’elle fuit depuis toutes ces années risque de s’ouvrir à nouveau sous ses pieds. Et cette fois, de l’engloutir pour de bon…
Sorcière de chair est un roman qui se lit à la fois facilement et difficilement. Les pages défilent rapidement, pourtant, le contenu pourrait freiner plus d’un cœur fragile. L’autrice n’épargne rien, ni à sa protagoniste ni à ses lecteurices. Si vous souhaitez pénétrer dans cette enquête sanglante, vous êtes avertis ! Dès le prologue, elle nous met en garde. Elle dévoile au fil de son intrigue des comportements que l’on pourrait définir comme horribles, terrifiants, violents. Cependant, ces mots sont bien trop faibles pour décrire la cruauté et les ténèbres qui étouffent les personnages. On assiste à un jeu de domination, de manipulation, d’égoïsme, de pouvoirs. La vengeance gangrène chaque personnage tour à tour, la haine explose au visage d’Arabella, la transperce de part en part. Mais ne soyez pas dupe, même elle n’est pas un ange.
Si les révélations se devinent vite, l’histoire n’en reste pas moins captivante. La romancière dépeint une Australie qui craint les sorcières, car celles-ci ont le pouvoir de manipuler la conscience et la mémoire. La magie est fondée sur la neurologie et offre des contraintes intéressantes dans le développement du suspense et de l’enquête d’Arabella. Les forces et les faiblesses sont dosées pour emmener notre protagoniste sur le chemin cruel du passé. Des souvenirs qu’elle aurait préféré effacer à jamais de sa mémoire vont bouleverser la vie qu’elle n’a même pas réussi à reconstruire, et salir les espoirs, les morceaux d’humanités auxquels elle se rattachait.
Malgré ses actes, malgré les sévices qu’elle a subis, notre enquêtrice possède encore une lueur vacillante au fond de son cœur. Une lumière naïve qui la raccroche à cette terre qui l’a maudite depuis sa naissance. Sarah Buschmann la torture autant physiquement que psychologiquement. Elle l’écrase, l’enfonce dans l’abyme glacial du désespoir.
En bref, Sorcière de chair dépeint la perfidie de la vengeance. Ce serpent répand son venin, corrompt les âmes et noircit chaque cellule jusqu’à étouffer tout espoir. Sous ces airs d’enquête simple, l’autrice offre une histoire dont personne n’en ressortira indemne. Personnages et lecteurices.