Des amours de soie de Martine Roland

  • Titre : Des amours de soie
  • Autrice : Martine Roland
  • Éditeur : Éditions Academia
  • Catégorie : roman noir

Attirée par les sorties de la collection Noir Desseins des éditions Academia, je n’ai pas résisté quand j’ai vu Des amours de soie dans la campagne masse critique de Babelio. Je remercie ce site bibliophilique et cette maison d’édition belge pour ce service presse qui a bousculé ma routine de lecture.

Qui es-tu, Milosz ? Un enfant de l’ombre, envahi par ta passion pour l’araignée tégénaire. Un jeune homme fragile, brisé par un premier amant volage, et réconcilié avec toi-même grâce à l’amour patient d’un père d’accueil et d’un sculpteur de talent. Tu deviendras un éminent entomologiste. Ultime consolation dans tes désillusions, ta passion te poussera-t-elle jusqu’à l’interdit ? Pourras-tu renouer avec toi-même et avec ton passé ? Peut-on te sauver, même au prix de l’amour inconditionnel ?

Ce roman est à l’image de la patience de l’araignée. Il esquisse, puis épaissit le portrait sur plusieurs années de Milosz. Structuré en trois parties, on assiste à sa situation de larve maltraitée, à sa métamorphose et à sa folie. Dès les premières pages, nous sommes plongés dans les profondeurs de l’obscurité. Cette cave où le garçon rencontre les êtres de l’ombre qui vont le passionner et diriger sa vie. À qui il va s’identifier, n’ayant comme exemple d’humanité que la violence paternelle et le harcèlement scolaire. Martine Roland tricote le monde souterrain avec tendresse et chaleur alors qu’elle percute au burin la famille de Milosz.

L’absence d’amour laisse sa marque sur le cœur de notre protagoniste. Tant qu’il n’avait pas goûté à cet hydromel, cette notion restait abstraite et détestable. À partir du moment où il le savoure, ce sentiment s’insinue dans ses veines à la façon du venin. Il le corrompt, le drogue et l’attire dans les méandres de la folie dans laquelle il s’englue. L’angoisse l’étouffe tout comme son ego qui se frotte à celui des autres.

Malsain, cruel, étrange. Ces mots incarnent le développement de cette descente en enfer où l’arachnologie et l’art s’entremêlent. On en apprend énormément sur nos amies les araignées. Une description de leur comportement annonce la couleur au début de chaque chapitre et assure un parallèle avec les actions de Milosz en plus de jouer le jeu de l’anticipation. J’ai également adoré l’apparition de l’œuvre de Louise Bourgeois qui y trouve une place d’honneur. Maman impressionne par son gigantisme et sa technique. Elle incarne avec perfection le conflit interne de l’antihéros : sa relation avec sa propre mère et avec lui-même. Inaccessible du haut de ses pattes, elle symbolise son rêve et son cauchemar d’enfant : protectrice et dangereuse. L’araignée en bronze nourrit sa relation avec Sergio, le sculpteur qui va l’aider à muer sans pour autant voir la noirceur envahir le cœur de Milosz.  

Maman de Louise Bourgeois

En bref, Des amours de soie tisse les conséquences désastreuses de la privation d’amour au moment de l’enfance et de la violence. À travers le prisme des arachnides, l’autrice sculpte la déchéance d’une âme abandonnée aux supplices des émotions et de la noirceur. Un survivant dont l’ego se frotte à de fortes personnalités dont les actes l’enfoncent dans son besoin fou de grandir, de se métamorphoser et d’exister.

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