Le naufrage du Titan C de Philippe Aurèle Leroux et Sébastien Louis

  • Titre : Le naufrage du Titan C
  • Auteurs : Philippe Aurèle Leroux et Sébastien Louis
  • Éditeur : Éditions Marathon
  • Catégories : jeunesse, science-fiction

J’ai rencontré Philippe Aurèle Leroux et Sébastien Louis lors du Salon du Livre de Wallonie en 2022. Chaleureux et passionnés, ils m’ont convaincue de craquer pour leur roman à quatre mains : Le naufrage du Titan C. N’ayant pas énormément de bouquins pouvant se caser dans le sous-menu Rocket Raccoon on the run (Automne des bois et au-delà) du Pumpkin Autumn Challenge, j’en ai profité pour le sortir de ma pal.

En 2412, la Terre est menacée par un astéroïde géant, l’Humanité n’a d’autre recours que l’exode. Les jumeaux Juliet et Kelvin Jayro, ainsi que de nombreuses personnalités, tel Krys Kart, le célèbre fightballeur, s’apprêtent à embarquer sur le centième vaisseau Titan pour un voyage sans retour vers Proxima du Centaure.

Dans les entrailles du vaisseau, Mertyn, jeune passager clandestin, tente d’échapper à la vigilance du quartier-maître Brett en se cachant parmi les animaux dont la belle Arja et son père sont responsables.

Sur la passerelle, le radio Redjy et le prodige de l’astrogation Dan sont les témoins de la tension qui règne entre le capitaine et sa second.

L’intelligence, l’héroïsme et la bravoure des uns suffiront-ils à compenser l’attitude irresponsable des autres ? Le Titan C atteindra-t-il Proxima du Centaure ?

Vous l’aurez deviné à son titre, ce roman est une réécriture du film Titanic, nom du malheureusement célèbre insubmersible qui a coulé lors de son premier voyage à cause de la dérive d’un iceberg. La transposition dans le futur et l’espace fonctionne plutôt bien, les caractéristiques phares ayant été reprises dans le livre. Si le paquebot se rend en Amérique, terre symbolisant un nouveau départ, le vaisseau quitte Mars pour sauver les Terriens de la destruction de l’humanité et donc enclencher une nouvelle vie dans le système solaire de Proxima du Centaure. Bien entendu, les 8 milliards d’individus n’y trouveront pas place. Nous restons dans une civilisation inégalitaire qui tente de l’être en organisant une loterie pour distribuer les billets. Soit vous avez une chance de cocu (bon quand on sait ce qu’il va se passer, peut-être pas finalement) soit vous avez un pedigree. Face à l’extinction, l’empathie ne se développe toujours pas.

L’inégalité est aussi présente parmi les passagers : ceux qui ont droit à une cabine et ceux qui ont droit à un cercuei… pardon, une cryogénisation pour faire dodo pendant tout le trajet et consommer le minimum. Oui, cette humanité est consciente des problèmes écologiques terrestres qu’elle a engendrés, mais elle est incapable de prendre la décision la plus responsable qui serait de préserver les ressources en ne laissant que l’équipage de bord éveillé. C’est d’autant plus risible quand on sait que Titan C est affrété pour sauver les humains, la faune et la flore et diriger par un Capitaine dont l’égoïsme surpassera la sécurité ! Il semblerait qu’en 500 ans la civilisation n’a pas évolué.

Enfin, dans ce décor féérique de bonté et de gratitude, nous avons les histoires d’amour transcendant les clans, les familles et les étiquettes. Nos adolescents n’ont pas perdu leurs hormones. Je ne vais pas m’étaler en long et en large sur eux, je vais vous laisser les découvrir en me focalisant sur la construction ou plutôt la déconstruction que les auteurs ont choisie et qui m’a plu.

Ceux-ci partent de clichés. Nous avons des adolescents plutôt communs. Kelvin est passionné par l’espace et connaît plein de choses contrairement à sa sœur qui paraît au premier abord superficielle. Vous savez, ces jeunes filles qui ne pensent qu’à trouver l’amour et qui craquent pour des stars capricieuses ? Un portrait qui va s’épaissir et se nuancer, heureusement ! Et cette méthode est d’autant plus appréciable lorsqu’elle a été appliquée à Morgana dépeinte par ses attributs féminins et sa blondeur avant sa sensibilité et ses compétences fortement utiles pendant du naufrage, en plus de son passé douloureux. La vie ne l’épargne pas, la pauvre !

J’ai également craint le cliché de la compétition féminine entre Juliet et Morgane, vu que la première n’apprécie pas celle qui ravit le cœur de son jumeau. Une rivalité amorcée par l’apparence, leur morphologie étant à l’opposé l’une de l’autre, n’est pas creusée et surtout, les romanciers n’ont pas attendu la catastrophe pour neutraliser ce sujet épineux pour moi. Ouf.

Une fois ces suspicions de stéréotype éteintes, je me suis laissée porter par ces récits parallèles. Des histoires aux aspirations et aux combats distincts et profondément humains. Et j’ai été surprise. Franchement, je ne m’attendais pas à subir ce flot d’émotions. Philippe Aurèle Leroux et Sébastien Louis ne reculent devant rien : sacrifice, douleur du survivant, espoir cruel. Les adolescents grandissent, propulsés par la tragédie causée par l’idiotie et l’orgueil. Ils prennent leur destin en main, un destin qui leur échappe, se précipite vers eux et joue avec leur cœur.

En bref, j’avais abordé Le naufrage du Titan C sans de grandes attentes, simplement emportée par la bonne humeur des auteurs. Grimaçant devant l’esquisse des adolescents, j’ai rapidement été soulagée par leur approfondissement psychologique qui les éloigne des clichés. J’ai fini par m’attacher à eux et je me fais surprendre par l’émotion dans les derniers rebondissements. Une réécriture réussie !